Pourquoi le thé à la menthe et les biscuits ne suffisent pas pour une politique inclusive. Hanan Challouki, experte en communication inclusive, fondatrice de mvslim.com et d’Allyens, un bureau spécialisé dans le marketing inclusif, donne également la parole à des entrepreneures de tout calibre dans son podcast « Wat zij wil ». Une conversation sans heurts et des idées intéressantes à partager. Laissez-vous inspirer par cette femme forte !
Hanan, inclusivité... Qu’est-ce que cela veut dire?
« Avec l’inclusivité, il s’agit d’impliquer les personnes dans toute leur diversité. Et attention, cela va plus loin que la couleur de peau ou la religion.
L’orientation sexuelle, la situation familiale et l’âge sont aussi des facteurs à prendre en compte. Il s’agit de notre société dans son intégralité. Une super diversité en somme. »
Pourquoi pensons-nous toujours de manière si limitée lorsqu’il s’agit de diversité?
« Lorsqu’on pense à un groupe-cible, il est beaucoup plus petit qu’on ne le croit. Nous nous prenons nous-mêmes comme cadre de référence. Oui, c’est un tantinet narcissique sans doute, haha. Mais aussi tellement humain.
Quand vous partez de votre propre univers, qui n’est pas diversifié, vous ratez un énorme groupe-cible potentiel. Et c’est souvent ce qu’il se passe dans les services de communication. Il faut donc plus de diversité autour de la table. »
Nous partons toujours de notre propre univers. Il faut donc plus de diversité autour de la table
Pourquoi cette inclusivité est-elle indispensable?
« On ne peut tout simplement plus l’ignorer en tant que personne et en tant qu’entreprise. Notre société est super diverse et cela ne changera plus. Elle ne fera qu’être encore plus diverse.
On le remarque aux discussions qui ont lieu au sein de la société. Par exemple, sur l’identité de genre et la reconnaissance.
Si, en tant que marque ou entreprise, vous n’êtes pas conscient de ce changement, vous ne serez plus dans le coup dans quelques décennies (voire avant). Il faut y être attentif en tant qu’entreprise. »
Si, en tant quâ'entreprise, vous n'étes pas conscient de l'importance de l'inclusivité, vous ne serez plus dans le coup dans quelques décennies
L’inclusivité doit-elle être ancrée dans notre culture d’entreprise?
« L’inclusivité commence de l’intérieur. Point. Si ça ne fonctionne pas en interne, ça ne fonctionnera pas en externe non plus. »
« Tout le monde, employés et ouvriers, veut être interpellé avec respect et pouvoir se dire : ici, je peux être qui je veux. »
C’est la seule manière d’avoir des ambassadeurs fiers de leur lieu de travail.
J’entends souvent : oui, la diversité est l’une de nos valeurs fondamentales. Mais comment ces valeurs sont-elles vécues et expérimentées ? Personne ne le sait. »
L'inclusion ne doit pas se résumer à un document qui reste dans la Dropbox. Il faut la vivre
Y a-t-il une différence dans l’approche entre les ouvriers et les employés?
« Je dirais, ne nous focalisons surtout pas uniquement sur les différences. Mais surtout sur ce qui nous unit, dans le respect des différences.
C’est la formule magique pour une bonne stratégie de communication inclusive. Tout le monde a le même besoin fondamental : être compris.
Ce sont surtout les canaux sur lesquels vous communiquez qui vont différer. Par exemple, les ouvriers ont moins vite accès à des ordinateurs sur leur lieu de travail. Mais il existe toujours une solution pratique évidemment. »
Concentrez-vous sur ce qui nous unit, dans le respect des différences de chacun
Comment faire en sorte que l’inclusivité soit présente au sein de votre entreprise?
« L’inclusivité ne s’acquiert pas avec de petites actions rapides. Ce n’est pas avec des pâtisseries marocaines et du thé à la menthe que vous aurez plus de diversité.
Posez-vous la question de savoir pourquoi vous voulez miser sur l’inclusivité. Vous serez sur la bonne voie pour démarrer. Quels sont les défis qui nous attendent ? Qu’est-ce qui nous a freinés auparavant ?
Vous allez alors créer un cadre, qui sera soutenu par tous. Vraiment tout le monde. Cela ne fait pas exception : le management est là mais pour le reste, il n’y a pas de soutien. Ça ne fonctionne pas comme ça. Cela doit aller dans les deux sens. »
Créez un cadre qui est soutenu par tous mais qui va aussi dans les deux sens
Comment impliquer vos collègues dans ce parcours d’inclusivité?
« Demandez ce qu’il en est, soyez à l’écoute. Tout part d’une communication ouverte. Instaurez le dialogue.
L’idée de changement ou d’adaptation n’est jamais agréable. Si vous ne faites pas preuve de suffisamment de soutien, cela peut donner un résultat négatif. « Vais-je devoir donner mon travail à des personnes qui sont ‘plus différentes’ ? »
Et il ne s’agit nullement de mauvaise volonté, mais bien d’incompréhension ou d’ignorance. Veillez donc à ce que tout le monde ait son mot à dire, impliquez-les dès le début. Et voyez surtout la valeur ajoutée. »
L'idée de changement est source de tension pour tout le monde, instaurez donc le dialogue
Comment évaluer ce qu’il se passe?
« Optez pour une approche personnelle et qualitative. Vous pouvez travailler avec des enquêtes, c’est déjà un bon début. »
« Mais ce n’est que lors d’un entretien individuel que vous verrez ce qu’il se passe. Vos collègues oseront parler beaucoup plus facilement et prendre position. »
« Vous aurez alors une image réelle et honnête. »
Pour résumer encore, quel est le grand avantage d’une communication inclusive?
« La communication inclusive permet une culture d’entreprise positive, où tout le monde se sent bien dans sa peau. Vos collègues sont plus épanouis et plus productifs.
Et ce n’est pas tout. Cela permet une plus grande implication qui se reflète sur le monde extérieur. Et ça, c’est bon pour votre image.
Une communication inclusive qui existe continuera d’exister. Il est donc aussi important d’y prêter suffisamment d’attention. Il ne suffit pas de prévoir une petite réunion avec l’équipe de la direction.
Il faut investir sur le long terme. Ça ne doit pas juste être ‘un petit projet’. Les belles choses prennent du temps pour se développer. »
Comme toutes les belles choses, l'inclusivité prend aussi du temps pour se développer.